UA : ces propositions de Smaïl Chergui pour combattre l’insécurité dans le Sahel

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Par la Rédaction le 8 Octobre 2020.

(IMPARTIAL ACTU)- Le monde entier est depuis plusieurs mois déjà aux prises avec la pandémie de la Covid-19. Mais le Sahel est quasiment obligé d’affronter et la pandémie et l’insécurité. Une situation sécuritaire qui inquiète l’Union africaine. Intervenant sur le sujet, Smaïl Chergui, le Commissaire à la paix et à la sécurité de cette institution estime qu’il est temps de redéfinir l’engagement collectif dans cette région afin de conjurer la spirale de la violence et leurs graves répercussions sur toute l’Afrique de l’Ouest.

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Le Sahel requiert aujourd’hui une attention toute particulière, afin de conjurer la spirale de la violence et une accumulation des défis socio-économiques et leurs graves répercussions sur toute l’Afrique de l’Ouest et menacer davantage la paix et la sécurité internationales. Il est temps de redéfinir notre engagement collectif au Sahel.

Alors que le monde est aux prises avec la pandémie de Covid-19, la situation dans la région du Sahel reste au centre de notre attention et de nos préoccupations. Les menaces à la sécurité auxquelles sont confrontés le Burkina Faso, le Tchad, le Mali, la Mauritanie et le Niger continuent de mettre à rude épreuve la sécurité humaine dans cette vaste région en accumulant le terrorisme et l’extrémisme violent, les violences intercommunautaires, l’impact oppressant du changement climatique et l’impatience des populations par rapport aux déficits de gouvernance politique et économique. Cela se traduit par les pertes en vies humaines, des déplacements massifs de populations, une pression insupportable sur les ressources naturelles, démultipliant les effets de destruction des attaques terroristes et les pertes d’opportunités économiques qui s’en suivent. Plus encore, un recul rampant des avancées démocratiques et socio-économiques.

L’instabilité dans les pays voisins, comme la Libye, ceux ou active Boko Haram et la République centrafricaine (RCA) a facilité l’extension des agissements des groupes extrémistes violents et la criminalité transnationale organisée dans la région. La guerre civile en Libye et la dissémination de djihadistes et des armes dans les pays voisins ,notamment ceux du sahel, ont servi de multicateur aux effets du coup d’État de 2012 au Mali, dans une région déjà confrontée à un déficit de gouvernance, à des défis structurels, à la pauvreté, à la faiblesse du système judiciaire, à la porosité des frontières, au terrorisme, à l’économie criminelle et à la prolifération des armes et de groupes rebelles.

La faiblesse des institutions maliennes a permis à tous ces groupuscules de se répandre dans tout le pays et au-delà. Les groupes terroristes et extrémistes ont exploité les conflits inter communautaires existants et développé des discours de recrutement axés sur la marginalisation et la stigmatisation. Les tensions entre éleveurs et populations sédentaires autour des terres, l’eau et le fourrage ont été ainsi amplifiées en ciblant les éleveurs peuls et en donnant raisonnance à leurs ressentiments envers le gouvernement et les autres communautés devenues rivales. En raison de la peur, de la victimisation, des incitations financières et matérielles, de l’exploitation du vide laissée par l’administration locale en s’attribuant son rôle ; la population vulnérable de la région a, volontairement ou involontairement rejoint les groupes terroristes et les réseaux criminels.

Le coup d’Etat de 2012 et la crise dans le nord du Mali ont provoqué une intervention militaire en janvier 2013 de la Mission internationale de soutien au Mali, sous conduite africaine (AFISMA), afin de soutenir les efforts des autorités nationales visant à récupérer et sécuriser le nord du pays. L’AFISMA a transféré, prématurément ,son autorité en 2013 à la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) désormais chargé de soutenir la mise en œuvre de l’Accord de paix d’Alger, la protection des civils et le soutien aux actions de stabilisation. D’autres partenaires du Mali se sont également déployés depuis cette date, initialement pour une courte durée, et s’y trouvent toujours. L’accord pou

La création de la Force conjointe du G5 Sahel en 2017 pour lutter contre l’insécurité, conjointement avec les 15.200 personnels de la MINUSMA et le soutien de partenaires extérieurs, a certes enregistre des avancées qui demeurent cependant non décisives. L’insurrection et les attaques entre communautés persistent en effet, et la menace s’étend aux pays de la côte ouest africaine.

La violence quasi quotidienne, associée à des allégations récurrentes de manquements aux droits de l’homme, a dressé les communautés les unes contre les autres d’une part, et contre les forces de sécurité et de défense d’autre part. Le récent coup d’État au Mali est venu ajouter un autre niveau de complication, avec le risque de déperdition du progrès démocratique dans la région.

Convaincus de ce que la solution ne peut se limiter au militaire et au sécuritaire, le Sahel étouffe cependant du nombre sans cesse renommes de programmes et de plus de 17 stratégies régionales et internationales, même si le G5 Sahel a formulé son propre Plan d’Investissement Prioritaire (PIP) en 2014. Les annonces de soutien connaissent tout au plus un taux de concrétisation de 20% et la situation dans la région se détériore de manière significative. Rien qu’en 2019, 800 incidents impliquant des groupes terroristes ont été enregistré au Burkina Faso, au Mali et au Niger et une augmentation de 35% du nombre d’incidents violents dans le bassin du Lac Tchad depuis l’année dernière, selon le Centre africain d’étude et de recherche sur le terrorisme (CAERT),qui note également une recrudescence des attentats terroristes depuis le début de la pandémie de Covid-19 dans la région du Sahel.

Aussi le moment est-il venu de revisiter et d’adapter la stratégie de stabilisation de la région du Sahel, une seule stratégie si possible, et il est essentiel de s’attaquer au miel qui attire les abeilles. Une approche multidimensionnelle est requise, combinant réponse militaire et sécuritaire, actions de développement, le primat de la justice et l’inclusion des communautés locales et des chefferies traditionnelles, les femmes et les jeunes dans la définition et la mise en œuvre des politiques. Bref, une approche qui respire l’appropriation nationale et régionale, loin de toute imposition de model ou de projets de développement, celle devant favoriser la reconstruction du tissu social et la consolidation de l’unité nationale des pays du Sahel. Par de là son soutien multiforme, le devoir de solidarité a amené l’Union africaine à lancer l’initiative d’un déploiement d’une force de 3000 soldats pour soutenir les pays du G5 Sahel en complément des efforts en cours de lutte contre le terrorisme. L’initiative a suscité le soutien des pays du G5 Sahel et au-delà et nous sommes en consultation avec tous les États concernés et la CEDEAO pour finaliser le concept d’opération, en tenant dûment compte des précautions supplémentaires due à la pandémie de Covid 19. Mais une nouvelle fois, les solutions militaires seules ne suffiront pas, nous aurons besoin d’approches globales, inclusives, concertées et collaboratives pour faire face à la multiplicité des défis dans la région.

A cette fin, la bonne gouvernance ne doit pas rester un slogan creux, la reddition de comptes devra être sacralisée et le développement socio-économique induire l’industrialisation et la création d’opportunité d’emploi afin de surmonter les problèmes structurels actuels. Cela prend encore plus de pertinence compte tenu des menaces récentes aux acquis démocratiques dans la région, y compris le soulèvement populaire et le changement anticonstitutionnel de gouvernement ; une situation qui souligne la lassitude des citoyens face au statu quo et les revendications sans cesse exprimées pour plus de dignité. Les peuples africains exigent de plus en plus des gouvernements qu’ils les servent plutôt qu’ils ne se servent en subissant l’humiliante influence extérieure et le transfert illicite de leurs richesses nationales qui s’ensuit. Les Africains exigent la reddition de comptes et ne cachent pas leur colère du fait que toute une génération a été privée de l’opportunité de contribuer à une vie meilleure pour leurs familles et leurs communautés. La légitimité n’est pas une affaire d’un jour, c’est une conquête de tous les instants.

Dans l’avenir, la transformation des défis sécuritaires dans la région du Sahel nécessitera un examen impartial, global et une lecture partagée des menaces et des défis, pour favoriser des réponses stratégiques et coordonnées. Nos États membres dans le Sahel devront s’attaquer aux causes structurelles à l’ origine des frustrations et des troubles sociaux qui alimentent le terrorisme, l’insurrection et la violence inter-communautaire. En un mot, promouvoir la sécurité humaine avec toutes ses exigences. Notre Continent a changé et les Africains doivent s’approprier le processus et le cheminement vers un changement transformateur, induisant stabilité et prospérité avec le concours de nos partenaires et non plus sous leur dictée.

Au plan opérationnel, le soutien aux initiatives africaines, y compris la mise en œuvre du PIP, le Plan d’action 2020-2024 de la CEDEAO en vue d’ éradiquer le terrorisme; l’initiative de l’UA de déployer 3000 soldats pour soutenir la force du G5 Sahel dans la région du Liptako-Gourma et surtout le règlement urgent de la crise libyenne, sont de nature à conforter les efforts des pays concernés pour lutter contre le terrorisme, le crime organisé et dupliquer la stratégie de stabilisation du lac Tchad au Sahel.

Bien que la pandémie du COVID-19 pose une multitude de défis à la paix et à la sécurité en Afrique, elle nous offre également l’opportunité de mobiliser nos efforts, de manière décisive, pour mettre fin aux conflits violents sur le continent et s’attaquer à leurs causes profondes. Nous devons sortir des sentiers battus et toute idée innovante est la bienvenue afin de faire taire les armes en Afrique, en premier lieu celles portées par les terroristes et les extrémistes violents.

L’Accord signé avec les talibans, le 29 février 2020, peut inspirer nos États membres, si les conditions sont réunies, pour explorer le dialogue avec les extrémistes et les encourager à déposer les armes, en particulier ceux qui ont été enrôlés de force dans les rangs de ces groupes. Dans le même temps, nous devons réaffirmer notre détermination à stopper la propagation du terrorisme et de l’extrémisme violent, à assécher leurs sources de financement et à mettre un terme à leurs agissements criminels.

Avec la multitude d’arrangements sécuritaires et de forces de sécurité opérant au Sahel, une coordination adéquate, efficace et sous commandement africain s’impose plus que jamais. Cela est d’autant plus pressant face au déploiement attendu des 3.000 soldats de l’UA dans la région et d’autres initiatives extérieures. Nous devons avoir l’humilité d’évaluer les implications financières des déploiements actuels au Sahel, leur efficacité et envisager de renforcer davantage la confiance et l’investissement dans le perfectionnement des forces de défense et de sécurité locales;

Enfin, et pour consolider leur résilience, nous devons renforcer les capacités des institutions de lutte contre le terrorisme des États membres concernés. Des capacités locales durables de lutte contre cette menace sont le meilleur investissement à long terme pour prévenir de nouvelles attaques et la propagation de l’idéologie porteuse sur le continent africain.

En ces moments de lutte implacable pour le leadership mondial et la concurrence explicite des puissances en Afrique, les pays africains, sous le leadership de l’Union Africaine, doivent saisir toutes offres authentiques de partenariat et retenir celles porteuses, dans le respect mutuel, de plus-value à nos populations et surtout à notre jeunesse.

Vaincre le terrorisme et l’extrémisme violent, par-delà l’incontournable mise en œuvre de l’Accord de paix d’Alger, est possible si nous travaillons solidairement contre toutes les formes de menace et mutualisons nos moyens. Une coopération harmonieuse et effective à l’égard des facteurs sous-jacents la radicalisation, notamment la pauvreté, est nécessaire pour empêcher une plus grande propagation des activités terroristes en Afrique. Sans ces efforts concertés, la pandémie de COVID-19 et la crise complexe en cours au Sahel agiront comme vecteurs du renforcement des frustrations et des griefs ayant permis à ces groupes criminels d’y prendre pieds. Cela rendra également plus difficile la prévention. Notre action collective et notre coopération sont plus que jamais indispensables pour l’avènement d’un Continent exempt de conflits. Il y va de la sécurité mondiale aussi

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