Publié par Impartial Actu le 31 mars 2018.
De nos jours, il est souvent question d’espèces qui disparaissent. Cette fois, des chercheurs ont débusqué une étonnante colonie de manchots Adélie. Ils en ont décompté pas moins de 1,5 million dans un archipel de l’Antarctique.
Le manchot Adélie doit son nom à la Terre Adélie, secteur dans lequel il a été identifié pour la première fois au début des années 1840. Aujourd’hui, on sait que sa présence se limite à la côte Antarctique et aux eaux environnantes. Mais alors que certaines colonies de l’ouest du continent sont en déclin, des chercheurs viennent de découvrir à quelques dizaines de kilomètres seulement, plus de 1,5 million de manchots Adélie qui n’avaient encore jamais été recensés.
C’est le satellite américain Landsat qui est à l’origine de cette incroyable découverte. En scrutant ses images, le regard des chercheurs a en effet été attiré par de surprenantes quantités… de guano ! Et une expédition sur place en 2015 a permis de confirmer — à partir d’observations au sol et d’images prises par drone — que vivaient là environ 1,5 million de manchots.
Un manchot Adélie et l’un des drones qui a servi au décompte de la colonie géante découverte du côté des Danger Islands. © Rachael Herman, Stony Brook University, Louisiana State University
Un manchot Adélie et l’un des drones qui a servi au décompte de la colonie géante découverte du côté des Danger Islands. © Rachael Herman, Stony Brook University, Louisiana State University
Danger Islands, une zone à protéger
Il était déjà connu que des manchots Adélie vivent sur l’archipel des Danger Islands. Mais pas en si grand nombre. Pourtant, une analyse rétrospective d’images aériennes remontant aux années 1950 montre que ces manchots vivaient déjà — et en nombre — dans la région à cette époque.
L’annonce de la découverte a été accompagnée d’un appel à la Commission pour la conservation de la faune et la flore marines de l’Antarctique pour la protection de cette zone. Car outre le réchauffement climatique qui semble mettre en difficulté le manchot Adélie à certains endroits, les activités humaines, la pêche en tête, pourraient bientôt venir menacer une espèce jusqu’alors plutôt préservée.
Le changement climatique profite à certaines colonies de manchots. En effet, par endroits, la banquise antarctique s’étend, offrant ainsi aux manchots Adélie plus d’espace pour la nidification. Ils ont en outre un meilleur accès à la nourriture. Explications sur cette étonnante rétroaction négative du climat.
Le climat change et certains animaux en souffrent. Les étés sont plus longs au pôle Nord et favorisent le déclin des ours polaires par exemple. Sous l’effet du réchauffement de l’atmosphère, nombre d’habitats sont modifiés si rapidement que les espèces animales n’ont pas le temps de s’adapter. Toutefois, dans la bataille du climat, s’il y a beaucoup de perdants, il y a aussi des gagnants. Du côté des végétaux, de plus en plus de cas de prolifération d’algues sont référencés. Puisqu’il y a plus d’ensoleillement, les conditions de bloom phytoplanctonique sont plus souvent observées aux hautes latitudes.
Certaines espèces animales profitent également de la modification rapide du climat. En Antarctique notamment, les glaciers reculent, mais la banquise s’étend dans certaines zones. C’est le cas au niveau de la mer de Ross, où vivent des groupes de colonies de manchots Adélie (Pygoscelis adeliae). L’un de ces groupes, qui s’installe sur l’île Beaufort lors de la nidification, a vu sa population augmenter sensiblement, en particulier depuis 2005.
Le manchot Adélie vit uniquement en Antarctique. Il passe 90 % de sa vie dans l’eau, et se repose sur les floes (fragments de glace) qui dérivent. © Samuel Blanc, cc by nc sa 3.0
Le manchot Adélie vit uniquement en Antarctique. Il passe 90 % de sa vie dans l’eau, et se repose sur les floes (fragments de glace) qui dérivent. © Samuel Blanc, cc by nc sa 3.0
En conditions neutres, les glaciers et falaises abruptes de l’île Beaufort limitent l’expansion de la population de manchots. Mais des chercheurs, ayant publié leurs résultats dans la revue Plos One, ont montré que sur cette île, les manchots Adélie sont en pleine augmentation. Ils révèlent plus précisément que depuis 2005, les juvéniles émigrent de moins en moins de ce milieu, pour au contraire s’y enraciner plus fortement.